A l’instant, un Frère m’envoie un message sur mon portable : « Pierre Benzaquen est
décédé » !
Je m’attendais à cette nouvelle, et pourtant, elle me laisse incrédule, et j’ai du mal à me l’imposer.
Et de me plonger il y a environ trente ans, lorsque jeune maçon, on m’avait parlé d’un apprenti qui serait victime d’antisémitisme dans sa loge. Je m’étais alors évidement intéressé à cela, et au milieu de cette affaire, le jeune initié m’avait confirmé ce qui m’avait été rapporté. Je m’étais alors employé à activer tous les « leviers » nécessaires, jusqu’à réussir l’ « exploit » de retirer cet apprenti de cette loge pour le parachuter dans la mienne…Vous l’avez compris, il s’agissait de notre Pierre, qui déjà foutait le b….. !
Mais pas d’hypocrisie, nos routes s’étaient séparées il y a bien longtemps, et s’étaient du reste encore plus écartées, avec son soutien fanatique, inconditionnel à François Stifani, l’ex Grand Maître radié de la GLNF.
A ce titre, nous nous étions affrontés parfois violemment, mais force est de reconnaître qu’il fallait avoir un certain courage à se faire alors l’« avocat du diable ». Il l’a été avec l’exagération qui le caractérisait – et qui lui a joué tant de tours – mais il a aussi fait partie de ceux qui n’ont pas « retourné leurs vestes » après sa défaite, et cela aussi mérite d’être salué.
J’avais tant de reproches à lui faire, de fond comme de forme, mais aujourd’hui, je ne veux que saluer la mémoire d’un homme qui avait du courage et un amour réel de la vie et de l’étude.
Pierre était épris de philosophie, de spiritualité, et s’essayait à apprendre – sur le tard – des rudiments d’études juives, cherchant à retrouver ses racines.
Il avait un autre mérite : parmi les critiques les plus virulents de la GLNF, il avait su, après sa démission tourner la page et passer à une réflexion plus profonde.
A cet égard, j’avais été amené dans le passé à écrire que Pierre n’avait jamais été aussi intéressant que depuis qu’il n’était plus membre de la GLNF.
Restera son blog, au ton devenu apaisé et intéressant, donnant – au sens du Talmud – à penser, à réfléchir.
En le parcourant, ces derniers temps, j’avais la sensation que Pierre, en publiant le maximum de ses réflexions passées ou présentes, y mettait tout ce qu’il avait : il s’agissait là d’une sorte de testament spirituel.
Nous nous étions parlé il y a environ un an, pour constater la permanence de nos divergences, mais aussi pour acter de la nécessité de conserver une relation apaisée.
Nous avions évoqué sa maladie, qu’il affrontait avec une fois de plus un grand courage.
C’est ce souvenir que je garde : celui d’un homme aux convictions fortes, un homme courageux.
Barouh Dayan haémeth.