L’histoire du Suprême Conseil Pour la France (SCPLF), qui va de désillusion en désillusion est peut-être en train de se jouer. Des sources très autorisées indiquent que ces jours-ci, la Juridiction Sud des Suprêmes Conseils américains (Mecque des Suprêmes Conseils réguliers, équivalent de la Grande Loge Unie d’Angleterre pour les obédiences régulières), comme la Juridiction Nord, ainsi que les Suprêmes Conseils canadiens pourraient rompre leurs relations d’avec le SCPLF…
On se souvient que sa direction précédente, dans un discours* lu par son Souverain Grand Commandeur (Jean-Luc Fauque) lors de la fête de l’Ordre en décembre 2011, a parfaitement défini quelles sont les règles régissant les rapports entre un Suprême Conseil régulier et l’Obédience régulière au sein de laquelle il recrute ses membres.
Or, peu de temps après, il décidait de faire l’inverse de ce qu’il prônait quelques mois auparavant, favorisant une scission au sein de la seule obédience régulière française, la GLNF, au profit d’une nouvelle obédience, irrégulière celle-là, la GLAMF.
Depuis, logiquement, de nombreux Suprêmes Conseils ont suspendu leurs relations avec le SCPLF, du Suprême Conseil pour l’Angleterre et le Pays de Galles au Suprême Conseil allemand, en passant par celui de Suisse.
Mais surtout, ce qui retenait l’attention, c’est que la Juridiction Sud des Etats-Unis et la Juridiction Nord avaient suspendu elles aussi leurs relations avec le SCPLF tout en lui demandant de trouver une solution d’apaisement avec la GLNF et le nouveau Suprême Conseil National de France (SCNDF).
Certes, le Souverain Grand Commandeur du SCPLF, Henri Lustman, a invité son homologue, le S.G.C Jacques Pra. à l’occasion de ses journées écossaises, et fait des avances pour satisfaire à cette exigence.
Mais celles-ci manquaient particulièrement de sérieux et demeuraient inacceptables alors que se jouait l’avenir du SCPLF au sein de la famille régulière.
En effet, alors même que le SCPLF a déjà un pied en dehors du monde des SS.CC. réguliers, non pas de son propre chef, mais parce qu’on l’y pousse, paradoxalement la ligne Lustman continue à vouloir négocier avec arrogance et condescendance.
Le problème est particulièrement vif. On sait que le précédent S.G.C. Jean-Luc Fauque a non seulement décrédibilisé sa Juridiction en ne respectant pas les termes de son fameux discours* lors de la Fête de l’Ordre, l’entrainant hors de la régularité, mais force est de reconnaître, selon ce qui m’est rapporté, qu’il y était hautement incité par son Lieutenant Grand Commandeur d’alors et successeur d’aujourd’hui, Henri Lustman !
Or celui-ci ne semble pas avoir bien compris ni les enjeux ni les rapports de force actuels.
En effet, si le SCPLF escomptait, après avoir planté un couteau dans le dos de la GLNF et orchestré une scission, qu’il lui suffirait de faire un sourire pour pouvoir phagocyter le nouveau Suprême Conseil National De France et obtenir un accord avec la GLNF, il se trompait. Très lourdement.
Cela d’autant plus que, depuis plus de cinq ans, il recrute au sein d’une obédience irrégulière, la GLAMF, qui n’est reconnue d’aucune obédience au monde, ce qui rend le SCPLF de plus en plus irrégulier, exactement au même titre que d’autres Suprêmes Conseils français souchés sur des obédiences libérales.
Cherchant une échappatoire, H. Lustman a pensé avoir une idée de génie : obtenir une fusion avec sa maison mère, le Suprême Conseil de France (SCDF) dont le SCPLF est une scission datant de 1965.
L’idée avait pourtant déjà été exploitée par Jean-Luc Fauque du temps où il était Souverain Grand Commandeur. Mais en vain, car les frères du SCDF avaient peu apprécié l’arrogance des représentants du SCPLF (selon ce qui m’avait alors confié l’un d’entre eux). Ceux-ci, pensaient pouvoir en imposer à leurs supposés partenaires en amenant un parc immobilier conséquent (Bineau + Villiers), ainsi que 4500 frères…
Manifestement, ce n’était pas suffisant pour impressionner les frères du SCDF qui avaient adressé une fin de non-recevoir, le Souverain Grand Commandeur Collin goutant fort peu les prétentions de ses interlocuteurs du SCPLF.
Nonobstant, Lustman, malgré une vive opposition interne, s’obstine à ranimer ce projet, en faisant miroiter à ses interlocuteurs du SCDF que cette fois, il saura se montrer plus souple que son prédécesseur. Il serait dit-on, même prêt à céder à toutes les exigences du SCDF.
Prenant acte que la Confédération Européenne des Suprêmes Conseils, censée le soutenir prend de la distance il cherche par tous les moyens à accélérer le rythme d’une fusion, pensant qu’apporter des actifs immobiliers éveillera l’intérêt du SCDF (qui n’en a pas), tout cela en vue de pouvoir se présenter devant la Juridiction Sud des Etats Unis. Lustman croit qu’en
contrebalançant l’irrégularité des membres de ce S.C. fusionné par leur nombre avoisinant 15.000 FF, il impressionnera les américains et sera ainsi adoubé.
Mais son calcul, particulièrement naïf, est biaisé.
En effet, les Frères du SCDF, leurs chefs en tout cas, ne peuvent ignorer que le SCPLF enregistre de nombreuses défections comme en atteste sa lettre colérique du 23 janvier dernier:
Il n’y a plus 4.500 frères au SCPLF, mais à peine 4.000, et ce chiffre baisse continuellement.
Du reste, si une fusion avec le SCDF était formalisée, il y a fort à penser qu’une nouvelle scission s’opèrerait, et que nombre de Frères, dont certains éminents choisiraient de quitter – avec regret il est vrai – la nouvelle structure. Selon ces derniers, la culture du SCDF est bien trop éloignée de la spiritualité et de la régularité pour permettre une fusion sereine et conforme à leurs aspirations. Ils ajoutent que le niveau des Frères du SCDF est bien inférieur à celui du SCPLF, et que, après les avoir rencontrés à de multiples occasions, notamment en participant à des Loges de Perfection, Chapitres, Aéropages etc.. leur réputation est totalement surfaite.
De plus, les actifs immobiliers se réduisent aussi nettement : L’hôtel particulier de Villiers est à vendre, tout en étant invendable en l’état, constituant un boulet et surtout une charge financière énorme.
La « dot » du SCPLF est donc en définitive peu attrayante pour le SCDF, qui en fait n’a de véritable intérêt pour le projet de Lustman que si celui-ci est en mesure, comme il le promet, de lui procurer la reconnaissance des Juridictions Sud et Nord des Etats-Unis.
C’est d’ailleurs dans cet esprit que des commissions travaillent déjà sur les futurs statuts, sur une harmonisation des rituels mais aussi sur les Bâtiments.
Or, les principaux Suprêmes Conseils du monde déjà ne peuvent que considérer des faits précis. Quels sont-ils ?
Premier constat : La vision d’Henri Lustman est erronée, date de temps désormais révolus et marque une profonde méconnaissance de la Franc-maçonnerie moderne.
Aujourd’hui, la quantité ne peut plus primer sur la qualité !
Deuxième constat : Le SCPLF a gravement violé les principes fondamentaux de non-ingérence dans les affaires des obédiences en initiant une scission au sein de la GLNF au bénéfice d’une obédience irrégulière et reconnue de personne.
Troisième constat :Depuis 2012, même si ses dirigeants ont assuré leur avenir personnel en devenant membres d’obédiences reconnues et en se gardant de devenir membres de la GLAMF, le SCPLF recrute dans une obédience irrégulière.
Dès lors, le SCPLF s’est totalement mis à l’écart et les Juridictions américaines ne peuvent que le constater.
S’agissant du deuxième larron, le SCDF, sa situation n’est pas moins claire :
1) Il gouverne le REAA du 1er au 33ème degré au sein de l’obédience mono-rite la Grande Loge de France (Puteaux), ce que les règles de la régularité proscrivent formellement.
2) Ses constitutions le revendiquent, en leur article 100.
3) Il recrute au sein d’une obédience, la GLDF qui n’est pas reconnue par une puissance maçonnique régulière.
4) Ses membres proviennent d’une obédience libérale, qui intervient dans le domaine politique et syndical, et ou la croyance en D-ieu n’est pas obligatoire.
Par conséquent, le SCDF est lui aussi hors du monde de la régularité.
Dès lors, nul besoin de passer par la prophétie pour conclure que le dossier de Lustman devant les Juridiction anglo-américaines n’a aucune chance d’être agréé et que le SCPLF est condamné, à rejoindre la cohorte déjà nombreuse en France des Suprêmes Conseils irréguliers mais parfaitement honorables ; Honorable d’autant plus qu’ils assument cette situation.
Le SCPLF aura-t-il lui aussi cette honnêteté ?
Faute de passer la main, il ne reste plus à Henri Lustman qu’à méditer sur cette Fable de Jean de La Fontaine, le Rat et l’huître : « Tel est pris qui croyait prendre… ».
Savantes manœuvres, ambitions déçues, rivalités, le SCPLF ressemble à s’y méprendre à un panier de crabes. Les dirigeants du SCDF continueront-ils à se laisser instrumentaliser pour d’autres épisodes décidemment peu glorieux ? A l’inverse, les frères du SCPLF renieront-ils leurs valeurs pour satisfaire des ambitions qui en sont tellement éloignées ?
Quel jugement les frères des prochaines générations porteront ils sur leur bilan ?
L’avenir nous le dira. Vite car tout s’accélère. Le sens de l’histoire est déjà tracé, il sourit désormais au SCNDF. Lentement, mais surement.
Les uns et les autres ne devraient jamais perdre de vue que la Franc-maçonnerie régulière est constituée par des règles, et que celles-ci ne doivent pas se modifier pour s’adapter à des ambitions personnelles. Au contraire.
* déclaration du 4 avril 2012 (https://www.scplf-reaa.org/ declaration/) ou l’on retient particulièrement les phrases suivantes : « La communauté des Francs-maçons écossais de la Grande Loge Nationale Française est aujourd’hui divisée entre les Frères qui restent membres de la GLNF et ceux qui rejoignent cette nouvelle obédience régulière. » (…) « Cette disposition exceptionnelle sera maintenue tant que la communauté internationale des Grandes Loges régulières n’aura pas fait connaître officiellement sa position définitive sur la reconnaissance d’une Grande Loge sur le territoire Français. »
Jean-Luc Fauque aurait donc aussi oublié que la GLNF est reconnue par l’ensemble des « Home Grand Lodges », par la plupart des Grandes Loges américaines, par environ 130 Grandes Loges dans le monde, alors que la GLAMF n’est reconnue par aucune Grande Loge ?
Mieux. Il avait prononcé, à l’occasion de la Fête de l’Ordre en 2011 un discours fameux resté dans toutes les mémoires, dans lequel on relevait les phrases suivantes :
« Je retiendrai seulement les éléments que nous devons avoir constamment à l'esprit:
- un seul Suprême Conseil et une seule Grande Loge sont reconnus sur un même territoire national,
- une Grande Loge détient sa reconnaissance d'une autre Grande Loge régulière, la filiation de la chaine de reconnaissance remonte à la Grande Loge Unie d'Angleterre, la première constituée,
- le processus est analogue pour les Suprêmes Conseils pour lesquels la filiation originelle est le premier Suprême Conseil de 1801,
- un Suprême Conseil reconnu régulier est tenu d'accueillir exclusivement des membres appartenant à une Grande Loge reconnue régulière. Pour certains territoires, les membres du Suprême Conseil doivent également appartenir à la Grande Loge régulière reconnue pour ce pays. En France cette condition n'existe pas. Néanmoins, la quasi totalité des Frères du Suprême Conseil pour la France est membre de la GLNF,
- les deux corps constitués sont souverains et s'engagent réciproquement à s'interdire de toute ingérence.
Voilà mes frères, un bref condensé non exhaustif des éléments essentiels et des problématiques qui constituent notre environnement maçonnique et pour lesquels nous avons à mettre en adéquation les solutions adaptées à la crise actuelle, dans le respect des principes immuables sans lesquels nos institutions n'existent pas. »
Pour l’anecdote, et pour faire plaisir à certains, le Souverain Grand Commandeur terminait son discours en scandant : « Que la volonté de D.ieu soit faite » !...